L’inauguration du parcours historique de Naussac a eu lieu le Dimanche 24 Juillet 2022. Ci joint le discours:
La commune de Naussac-Fontanes est une commune nouvelle issue de la Fusion des communes historiques de Naussac et de Fontanes. Cette fusion est effective depuis le 01 Janvier 2016. Nous avons voulu unanimement conserver « Naussac » dans le nouveau patronyme pour ne pas oublier que Naussac est une commune dont l’histoire singulière est à la fois douloureuse et porteuse d’espoir.
Depuis de nombreuses années les différents conseils municipaux ont souhaité retracer cette histoire pour permettre de positiver une transition. Cette transition a été envisagée remplie de projets à forte vocation touristique ou urbanistiques, considérant le nécessaire respect de la transition écologique et de l’environnement paysager.
Pour marquer ce passage et tous les changements apportés par la construction et la mise en eau du barrage réservoir, le conseil municipal à imaginer « graver dans le marbre » l’histoire de la vallée de Naussac en faisant cheminer les nombreux promeneurs autour de l’élément central qu’est le lac.
De cette idée est née le « Parcours historique » qui va être inauguré aujourd’hui malgré une fin des travaux en 2021, crise sanitaire oblige nous avons dû reporter deux fois cette étape importante. Je souhaite publiquement rendre hommage aux personnes qui se sont beaucoup investies dans sa conception et sa réalisation. Il s’agit en particulier d’Alain Gaillard, Daniel Bacon et Daniel Cellarier, membres du conseil municipal et d’Elisabeth Coutarel notre secrétaire de Mairie, qui ont beaucoup œuvrés pour réaliser un travail de recherche documentaire et de mise en forme. Ce travail a réellement débuté avec l’accueil d’un stagiaire, Teddy, enfant de la commune qui a fait de cette idée le sujet central de son travail.
Ce parcours veut retracer l’histoire du village de Naussac et des villages qui l’entouraient démolis et reconstruits au moment de la réalisation du barrage réservoir. Le parcours thématique permet que cette vallée disparue sous les eaux, ses villages, mas, hameaux, ainsi que son patrimoine, les personnages qui ont marqué son histoire, mais aussi ses combats lors de la construction du barrage, ne soient pas oubliées. 40 ans ont été nécessaires pour permettre aux anciens habitants de panser leurs plaies. De nombreux livres, films, documentaires, articles de presse sont parus ayant pour thématique le déplacement forcé des habitants et le traumatisme engendré. Je peux annoncer aujourd’hui, puisque nous l’avons voté en commission permanente du conseil départemental ce Vendredi 22 Juillet, que les archives départementales vont créer et conserver une base documentaire consultable et accessible à tous.
Le parcours historique est installé sur le domaine public (entrée du village, narthex de l’église, rues, places, aire de jeux, Site de la Tour ….), je vous inviterais à cheminer pour le découvrir à la fin de cette inauguration. Il comprend des pupitres et panneaux avec textes et photos retraçant l’historique de la vallée engloutie. Le parcours se termine par une table d’orientation disposée au cœur du village sur un site qui domine le barrage. Cette table comporte une carte où sont positionnés le barrage, l’ancien village de Naussac, l’ensemble des hameaux et mas noyés. Les supports sont réalisés en bois et en fer, les photos et textes en inclusion par vitrification.
Il comporte :
– Plusieurs pupitres installés dans le narthex de l’église
– Plusieurs panneaux installés dans le village
– 1 table d’orientation
– Un fléchage directionnel
Cette trace de l’histoire de la vallée engloutie doit permettre aux visiteurs de comprendre cet évènement historique initialement douloureux pour les habitants de la vallée, il pourra servir de support à des animations par les enseignants, animateurs, guides de pays. Il est en accès permanent, ouvert à tout public et gratuit. Il vient compléter l’offre touristique existante et le cheminement du tour du lac. Facile d’accès y compris pour les personnes à mobilité réduite il permet de cheminer au sein du « nouveau » village de Naussac. J’emploie le terme « nouveau » car pour les anciens, le village originel de Naussac dort en quelque part sous les eaux du lac.
Ce projet d’un coût total de 68060 € Hors Taxes a été financé par le conseil départemental à hauteur de 17854 €, la Région Occitanie à hauteur de 17854 € et le programme leader à hauteur de 18055 €, le reste étant l’auto-financement de la commune. Merci à l’ensemble des financeurs sans qui cette opération n’aurait pu être réalisée.
Je souhaite remercier également les entreprises qui ont réalisé les différents éléments de ce parcours, à savoir :
- La Société Pic Bois pour les Panneaux, pupitres et le fléchage,
- L’entreprise « Jardins et Paysages » pour leur implantations,
- Mme LAPOUGE Marie-Noëlle pour la réalisation de la table de lecture,
- La SARL Maisons et Jardins GAILLARD pour les travaux de maçonnerie,
- Serge GAILLARD pour la réalisation Supports et barrières,
- Lhermet Menuiseries pour les travaux de fermeture du narthex de l’église.
Les géologues attestent que la vallée de Naussac était déjà un site lacustre au temps des dinosaures. Elle a toujours formé une immense cuvette propice à des projets de rétention d’eau. Depuis l’Antiquité ce bassin à fond plat fournissait de riches terres agricoles. Au début du XIX°siècle la vallée est connue comme le grenier à seigle du Nord-Est de la Lozère. Dès 1943 elle fait parler d’elle en raison d’un gigantesque projet de barrage électrique.
Je laisse la parole à Alain Gaillard, Maire délégué qui va nous retracer l’histoire de la vallée et des opérations de réalisation du barrage réservoir.
L’histoire des villages et de la vallée de Naussac
Déjà dans les années 1940 à 1945 la vallée de Naussac commence à faire parler d’elle puisque les frères Vincent concoctent un projet de barrage gigantesque nommé ENYTRACK cinq fois plus grand que le lac d’Annecy qui envisager de noyer la ville de Langogne sous 150 mètres d’eau. Ce projet situé dans la vallée de l’Allier près du Village de Fontanes à vocation de production électrique était censé produire dix milliards de Kilowatts par an.
Par la suite en 1952 une enquête préalable à déclaration d’utilité publique est réalisée par EDF pour la réalisation d’un barrage dans la vallée de Naussac permettant d’approvisionner le futur barrage de Montpezat qui devait dévier l’Allier et la partie haute de la Loire vers le Rhône. Une immense création de galerie devait relier ces deux projets. Ce deuxième projet est par la suite ajourné et ne verra jamais le jour.
Malgré ces deux échecs le sort de la vallée de Naussac est scellé puisque quelques années plus tard, dans les années 1960, un projet de barrage voit à nouveau le jour, plus modeste celui-là. Il deviendra bientôt nécessaire pour assurer un débit minimum à l’Allier et à la Loire pour assurer l’irrigation des espaces agricoles tels que la Limagne et aussi et surtout refroidir les centrales nucléaires.
C’est dans les années 1970 que le projet se concrétisera puisqu’un accord interministériel décide de créer un barrage réservoir à Naussac et confie le projet à la société SOMIVAL (Société pour la mise en valeur Auvergne Limousin) basée à Clermont-Ferrand. L’utilité publique est décrétée le 6 février 1976 et les travaux commencent au printemps 1977. La mise en eau aura lieu en septembre 1980.
Pendant les travaux du barrage, la reconstruction du village de Naussac a eu lieu entre 1978 et 1980 et c’est dans ce nouveau village que seront relogés pour ceux qui le souhaitent, les habitants de la vallée engloutie qui comprenait :
- Le village de Naussac
- 3 hameaux sur la commune de Naussac : Réals ; Méjasolle et la Rougeyre.
- 1 village sur la commune de Langogne : La Ponteyre.
- 3 Mas sur la commune de Langogne (Malpertus ; Surgères et la Gazelle).
Un article de presse intitulé « Naussac, année zéro » résumait ainsi la situation des habitants de la vallée :
« Des maisons toutes neuves et un confort qu’ils n’avaient jamais connu, les habitants de Naussac, village voué à la noyade pour raison d’énergie, réapprennent à vivre dans un nouveau décor, comme des exilés.
Qu’importe si, depuis des siècles ces ruraux, dont les ancêtres avaient jeté l’ancre dans la vallée, entre Langogne et Auroux, vivaient heureux sur leurs terres. La construction d’un barrage les en a chassé, mais, délicate attention, on les a fait aménager dans un village tout neuf » Le journaliste termine l’article en posant la question des conséquences humaines ?
Les plaies pour les habitants de l’époque sont restées ouvertes. Aujourd’hui la beauté de l’environnement ne doit pas faire oublier ces moments d’histoires personnelles dramatiques.
Plusieurs manifestations, rassemblements, actes divers de sabotage ainsi que la démission de l’ensemble des conseils municipaux des communes concernées par cette implantation ont eu lieu pour s’opposer à la réalisation du barrage. Aucune de ces actions n’ont permis de revenir sur la décision prise.
La surface du barrage est légèrement inférieure à 1000 hectares quand il atteint sa côte maximale ; sa plus grande profondeur est d’environ 45 m ; la quantité d’eau stockée est d’environ 190 millions de m3. Il subit des marnages importants en fonction du soutien des étiages de l’Allier et de la Loire. Pour son remplissage, qui ne pouvait être assuré totalement par le petit ruisseau du Donozeau sur lequel le barrage est érigé, ont été réalisés un tunnel qui dévie une partie des eaux de la rivière Chapeauroux par une petite retenue en amont du village d’Auroux et un pompage des eaux de l’Allier par un tunnel qui amène l’eau au pied du barrage (Naussac 2). Ces pompes assurent le remplissage et deviennent turbines pour produire de l’électricité pendant les vidanges.